Processus de Galton-Watson
On fixe une loi discrète finie $p$ sur $\mathbb{N}$ : $p=(p_0,p_1,\dots,p_r)$.
On définit un processus de population $(Z_n)_{n\in\mathbb{N}}$, où $Z_n$ est le nombre d'individus de la $n$-ième
génération:
- $Z_0=1$ (initialement la population est constituée d'un unique individu);
- on passe de la génération $n$ à la génération $n+1$ de la manière suivante: chacun des $Z_n$ individus de
la $n$-ième génération à des enfants selon la loi $p$, indépendamment des autres individus.
1. Simulations numériques.
Il est possible de simuler de proche en proche les variables aléatoires $Z_n$.
Si on note $L_n^{(k)}$ la variable aléatoire égale au nombre
d'enfants du $k$-ième individu de la $n$-ième génération, les variables aléatoires
$(L^{(n)}_k)_{(k,n)\in\mathbb{N}}$ sont i.i.d. de loi $p$ et :
$$ Z_{n+1}=\left\{ \begin{array}{cl} 0 & \hbox{si } Z_n=0 \\\\
\displaystyle\sum_{k=1}^{Z_n} L_n^{(k)} &
\hbox{sinon} \end{array}\right. $$
Notons en particulier que, pour tout $n\in\mathbb{N}$, $Z_n$ est indépendante de la famille
$(L^{(n)}_k)_{k\in\mathbb{N}}$, ie que la taille de la population de la $n$-ième génération est indépendante
du nombre d'enfants que va avoir chaque individu de cette même génération.
On dispose en fait d'un algorithme plus efficace.
Si on note $A_{n,k}$ le nombre d'individus de la $n$-ième génération qui ont exactement $k$ enfants alors,
sachant $Z_n=i$, le vecteur $(A_{n,0},A_{n,1},\dots,A_{n,r})$ suit la multinômiale de paramètres $(i,p)$ et :
$$Z_{n+1}=\sum_{k=0}^r k\times A_{n,k}$$
2. Loi du nombre d'individus.
On peut déterminer la loi de $Z_n$ à l'aide de sa fonction génératrice.
Pour cela, on note $\varphi_{Z_n}$ la fonction génératrice de
$Z_n$, $\varphi_p$ la fonction génératrice de $p$ et :
$$\varphi_p^{\bigotimes n}=\underset{n\hbox{ compositions}}{\underbrace{\varphi_p\circ\varphi_p\circ\dots
\circ\varphi_p}}$$
Rappelons que pour tout $s\in[-1,1]$ :
$$\varphi_{Z_n}(s)=\mathbb{E}\big(s^{Z_n}\big)=\sum_{k=0}^{+\infty}s^k\mathbb{P}(Z_n=k)\quad\hbox{et}
\quad \varphi_p(s)=\sum_{k=0}^{+\infty}s^k p_k$$
On a alors le résultat suivant : pour tout $n\in\mathbb{N}^*$ et $s\in[-1,1]$,
$\;\varphi_{Z_{n+1}}(s)=\varphi_p\big(\varphi_{Z_n}(s)\big)$.
On en déduit que $\varphi_{Z_n}(s)=\varphi_p^{\bigotimes n}(s)$.
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D'après la formule de l'espérance totale, on a pour tout $n\in\N$ et $s\in [-1,1]$ :
$$\begin{eqnarray*}
\E\big(s^{Z_{n+1}}\big)&=&\sum_{k=0}^{+\infty}\E\big(s^{Z_{n+1}}\big|Z_n=k\big)\times\p(Z_n=k)\\
&=&\p(Z_n=0)+\sum_{k=1}^{+\infty}\E\Bigg(s^{\sum_{i=1}^{k}L_n^{(i)}}\Bigg|Z_n=k\Bigg)\times\p(Z_n=k)\\
&=&\p(Z_n=0)+\sum_{k=1}^{+\infty}\Bigg[\prod_{i=1}^k\E\Bigg(s^{L_n^{(i)}}\Bigg|Z_n=k\Bigg)\Bigg]\times
\p(Z_n=k)\\
&=&\p(Z_n=0)+\sum_{k=1}^{+\infty}\Bigg[\prod_{i=1}^k\E\Bigg(s^{L_n^{(i)}}\Bigg)\Bigg]\times\p(Z_n=k)\\
&=&\p(Z_n=0)+\sum_{k=1}^{+\infty}\Bigg[\prod_{i=1}^k\varphi_p(s)\Bigg]\times\p(Z_n=k)\\
&=&\p(Z_n=0)+\sum_{k=1}^{+\infty}\varphi_p(s)^k\p(Z_n=k)\\
&=&\p(Z_n=0)+\sum_{k=1}^{+\infty}\varphi_p(s)^k\p(Z_n=k)
\end{eqnarray*}$$
ie :
$$\varphi_{Z_{n+1}}(s)=\varphi_{Z_n}\big(\varphi_p(s)\big)$$
Le résultat découle ensuite d'une simple vérification par récurrence.
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On suppose dans la suite que la loi de reproduction a un moment d'ordre $2$.
On notera $\mu$ son espérance, $\sigma^2$ sa variance :
$$\mu=\sum_{k=0}^{+\infty}k\times p_k\quad\hbox{et}\quad\sigma^2=\sum_{k=0}^{+\infty}(k-\mu)^2\times p_k$$
et on supposera que $\sigma^2>0$.
On est maintenant en mesure de calculer l'espérance et la variance de $Z_n$.
$Z_n$ a un moment d'ordre $2$ et on a :
$$\E(Z_n)=\mu^n\quad\hbox{et}\quad V(Z_n)=\begin{cases}n\sigma^2&\hbox{si }\mu=1\\
\dfrac{\sigma^2(\mu^n-1)\mu^{n-1}}{\mu-1}&\hbox{si }\mu\neq1\end{cases}$$
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Puisque $p$ a un moment d'ordre $2$, la fonction $\varphi_p$ est deux fois dérivable à gauche en $1$.
Il en est donc de même pour $\varphi_{Z_n}$, ce qui prouve que $Z_n$ admet un moment d'ordre $2$.
En dérivant la formule $\varphi_{Z_{n+1}}(s)=\varphi_p\big(\varphi_{Z_n}(s)\big)$ et évaluant en $s=1$, on obtient :
$$\E(Z_{n+1})=\mu\times\E(Z_n)$$
ce qui donne facilement: $\E(Z_n)=\mu^n$.
En dérivant deux fois on obtient :
$$\varphi_{Z_{n+1}}''(1)=\varphi_p''(1)\times\varphi_{Z_n}'(1)^2+\varphi_p'(1)\varphi_{Z_n}''(1)$$
En remarquant que $V(Z_n)=\varphi_{Z_n}''(1)+\varphi_{Z_n}'(1)-\varphi_{Z_n}'(1)^2$, on vérifie la formule donnée
par récurrence.
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Une autre quantité intéressante est la probabilité d'extinction :
$$q=\p\left(\bigcup_{n=0}^{+\infty}[Z_n=0]\right)$$
Puisqu'on a $[Z_n=0]\subseteq[Z_{n+1}=0]$, pour tout $n\in\N$, le théorème de continuité monotone donne que :
$$q=\lim_{n\to+\infty}\p(Z_n=0)$$
Cette probabilité $q$ peut être calculée à l'aide de la fonction génératrice $\varphi_p$.
$q$ est une racine de l'équation $\varphi_p(s)=s$.
Si on suppose de plus que $p_0+p_1<1$ (les individus ont une probabilité non nulle d'avoir au moins 2 enfants),
alors :
Cas sur-critique : si $\mu>1$, alors $0\leq q<1$.
Cas critique : si $\mu=1$, alors $q=1$.
Cas sous-critique : si $\mu<1$, alors $q=1$.
Remarque. Dans le cas sur-critique, avec une loi de fécondation géométrique, on peut calculer $q$ de manière
explicite.
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Puisque $\p(Z_n=0)=\varphi_{Z_n}(0)$ on a $q=\dlim_{n\to+\infty}\varphi_{Z_n}(0)$.
D'autre part, puisque $\varphi_p$ est continue sur $[-1,1]$, on a :
$$ q=\dlim_{n\to+\infty}\varphi_{Z_n}(0)=\dlim_{n\to+\infty}\varphi_{Z_{n+1}}(0)
=\dlim_{n\to+\infty}\varphi_p\big(\varphi_{Z_n}(0)\big)
=\varphi_p\left(\dlim_{n\to+\infty}\varphi_{Z_n}(0)\right)=\varphi_p(q)$$
donc $q$ est racine de l'équation $\varphi_p(s)=s$.
Remarquons ensuite que $1$ est racine de cette équation, et que la condition $p_0+p_1<1$ donne la stricte
convexité sur $[0,1]$ de $s\longmapsto g(s)=\varphi_p(s)-s$, et donc le fait que l'équation $\varphi_p(s)=s$
a au plus deux solutions dans $[0,1]$.
On en déduit qu'elle a au plus une solution dans $[0,1[$.
Cas sur-critique : si $\mu>1$, donc $g'(1)>0$, alors $g$ est strictement croissante
sur un voisinage $]1-\delta,1]$ à gauche de $1$, et comme $g(1)=0$, on en déduit que $g$ est
strictement négative sur $]1-\delta,1[$.
Comme $g(0)=p_0\geq0$, le théorème des valeurs intermédiaires assure l'existence de $s_0\in[0,1[$ tel que
$g(s_0)=0$.
L'équation $\varphi_p(s)=s$ a donc une unique solution dans $[0,1[$.
D'autre part en remarquant que $\varphi_p$ est croissante sur $[0,1]$, une récurrence évidente donne que
$\varphi_{Z_n}(0)=\varphi_p^{\bigotimes n}(0)\leq s_0$.
Par prolongement des inégalités, on a alors $q\leq s_0$, et en conclusion $q=s_0<1$.
Cas critique et sous-critique : si $\mu\leq 1$, on a $g'(1)\leq 0$.
La stricte convexité de $g$ entraîne que $g'$ est strictement décroissante sur $[0,1]$, et le théorème des
accroissements finis donne alors que $g$ est strictement positive sur $[0,1[$.
On en déduit que l'équation $\varphi_p(s)=s$ a une unique solution dans $[0,1]$: $q=1$.
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On en déduit immédiatement une convergence presque sûre dans le cas $\mu\leq 1$.
Si $\mu\leq 1$ et $p_0+p_1<1$, alors $Z_n\underset{n\to+\infty}{\overset{\hbox{p.s.}}{\longrightarrow}}0$.
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Il suffit de remarquer que $q=\p\left(\di\bigcup_{n=0}^{+\infty}[Z_n=0]\right)=1$ et :
$$\bigcup_{n=0}^{+\infty}[Z_n=0]=\big[\exists n_0\in\N/\,\forall n\geq n_0,\,Z_n=0\big]
= \left[Z_n\underset{n\to+\infty}{\longrightarrow}0\right]$$
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Dans les cas de non extinction, on a le résultat suivant.
La suite $\left(\dfrac{1}{\mu^n}\p(Z_n>0)\right)_{n\in\N}$ est décroissante.
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La croissance de $\varphi_p$ et le théorème des accroissements finis donnent :
$$\mu=\varphi_p'(1)\geq\frac{1-\varphi_p(x)}{1-x}$$
pour tout $x\in[0,1[$.
On en déduit :
$$(1-x)\mu\geq 1-\varphi_p(x)$$
pour tout $x\in[0,1]$.
Pour $x=\p(Z_n=0)=\varphi_{Z_n}(0)$ on a donc :
$$\mu^{-n}\p(Z_n>0)=\mu^{-n}\big(1-\varphi_{Z_n}(0)\big)
\geq \mu^{-n}\big[1-\varphi_p\big(\varphi_{Z_n}(0)\big)\big]
=\mu^{-(n+1)}\big(1-\p(Z_{n+1}=0)\big)$$
pour tout $n\in\N$.
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Author: Arnaud Bégyn
Created: 2024-08-14 mer. 23:49
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